HOMMAGES
Depuis plusieurs jours les médias évoquent la vie du Général de Gaulle à l'occasion du cinquantenaire de sa disparition
Il est rappelé que seulement 1 038 personnes, cinq communes et dix-huit unités combattantes ont été nommées compagnons de la Libération car elles se sont « signalées dans l'œuvre de libération de la France et de son Empire » durant la Seconde Guerre mondiale.
Parmi ces 1 038 compagnons, 271 l'ont été à titre posthume, soixante n'étaient pas des Français au moment d'être nommés et six sont des femmes.
S'il est important de d'évoquer les grandes figures qui se sont engagés dés 1940, et personnellement je le fais dans toutes mes interventions auprès des scolaires, je pense qu'il est tout aussi important de sortir de l'anonymat les milliers de femmes et d'hommes qui se sont engagés au péril de leur vie pour défendre les valeurs de la République, la Justice, la Solidarité, la Fraternité.
C'est pourquoi je souhaite parler de l'action de ma famille et particulièrement de mon Père, dont c'est aujourd'hui 10 novembre, le 40ème anniversaire de sa disparition.
Le 13 novembre 1980 près de 800 personnes précédées de 32 drapeaux venus de toute la France l'accompagnaient pour lui rendre un dernier hommage.
J'ai hésité avant de faire ce témoignage, j'avais l'impression de trahir leur intimité, eux si humble mais si chaleureux vis à vis de leurs camarades
J'ai toujours le souvenir de tentative de questionnement, je n'osais pas trop faire parler mon Père car je me rendais compte que c'était très douloureux pour lui, alors je demandais à ma Mère ce qu'elle avait fait et après quelques secondes la réponse était "moi à coté de ton Père ce n'était rien" . Les attestations de ses chefs que j'ai retrouvé après son décès m'on prouvé le contraire
Voici un résumé de leurs actions:
Période de 1936 à 1938 (recherche à poursuivre)
Dès 1940 , après l'interdiction de la presse démocratique par Pétain , ils distribuent les tracts clandestins.
Ils ne considéraient pas l'évocation de cette Résistance comme primordiale et représentative de leur action.
Ils ont été toujours humbles et discrets , les notes manuscrite que je retrouve (confirmées par des attestations de camarades ) écrites en style télégraphique sans verbiage en sont la preuve
40 ans après la disparition de mon Père et 31 ans pour ma Mère , les témoins qui les ont connu me rapportent le respect qu'ils suscitent toujours dans la mémoires des survivants
Sur la période 1940 - début 1943 je dispose de peu de choses cependant quelques éléments me font penser que cette période ne fut pas inactive:
1/ mes souvenirs un peu flou ( 3 ans / 3 ans ½ ) évoquent mon Grand-Père maternel et ma Mère ( Cours E. Zola à Villeurbanne 69) (je suis né en juillet 39)
2/ une anecdote que m'ont raconté mes Parents ( lorsque j'étais ado ) , mon Père m'avait emmené avec lui pour passer plus facilement inaperçu , nous marchions en ville ( il transportait une valise dans laquelle il y avait des armes) en sautillant ,comme le font souvent les petits, j'ai fais tomber le fusil d'un soldat allemand que nous croisions. L'allemand a mis mon Père en joue en vociférant, l'autre soldat qui l'accompagnait l'a calmé et il ont poursuivi leur chemin. Mon Père n'a pas compris ce qu'ils disaient mais l'attitude du second soldat lui a fait penser qu'il avait des enfants et qu'il a minimisé la porté de mon geste. A la suite de la peur que cet incident a provoqué , mes Parents m'on placé à la campagne chez des personnes qui soutenaient la Résistance ( je crois qu'il s'agissait de la famille CUMINAL à Panossas !!!)
Ceci devait se passer fin 42 / début 43 puisque les notes de mon Père sur son parcours ,que j'ai retrouvé évoque sa présence à Chauffailles ( Set L) en juillet 1943
3/ A partir de décembre 1943 ma Mère qui était agent de liaison (pseudo '' Marcelle '' )pour toute la zone sud ,dans le réseau Action Ouvrière, sous les ordres de Jean GAY Commandant FFI ( pseudo '' Jacqueline '') arrêté en 44 déporté à Neuengamme. Après l'arrestation de J. GAY elle sera sous les ordre de Louis Gault puis Lerstrade et rejoint le Front National de Libération sous le pseudo de '' Colette ''
Mon Père était pupille de la Nation
A participé à la destruction d'un transformateur d'un chantier du port Rambaud travaillant pour les Allemands
la gare d'eaux de Vaise ( surveillance navigation fluviale )
la centrale de la Mouche
les usines de Givors et de Pont de Chéruy
Son groupe à participé:
à la destruction d'une usine de roulements à billes ( à la demande de l' E. M. )
au sabotage général du 1er mai 1944 en coupant des voies ferrées et des lignes électriques
à la destruction d'un stock de cuir destiné aux allemands dans une usine de courroies lyonnaise
vers le fin mai ont participé activement à l'organisation de l'Insurrection Nationale :
transports d'armes
organisation des dépôts
préparation d'un plan d'action général
8 juin 1944
Arrestation de 3 membres de son groupe , perquisition aux dépôts de Brignais et de la Croix- Rousse
Résultat: 1 mort , LONGARINI de Givors qui a voulu sortir son pistolet , 2 arrestations , '' Milan '' et lui
'' Interrogé '' 3 fois place Bellecour ,torturé il ne parle pas, interné à Montluc jusqu'au 1er juillet1944 puis Compiègne , départ en Allemagne le 15 juillet 1944
camps de concentration de Neuengamme
puis versé au Kommando de Brême – Blumenthal
Voir le témoignage de Camille Labrux joint dans un article précédent
Pour mémoire autres membres de ma famille:
Thérèse Caron née Rigaud cousine germaine de ma Mère , agent de liaison région parisienne pour les FTP-MOI , arrêtée en 43 incarcérée NN 8 mois à Fresnes Déportée à Ravensbrück
Son frère Pierre Rigaud arrêté le 3 octobre 40 avec des camarades qui seront parmi les 27 fusillés à Chateaubriand est emprisonné à Fontrevault, puis Clairvaux, Chateaubriand et enfin Royallieu ou il sera fusillé le 7 mars 42
Martial Bergeret cousin par alliance et son frère Maurice, Résistants région de Grenoble, arrêtés et Déportés à Dachau
J'ai eu l'honneur de connaitre de nombreux camarades de mes Parents, tous méritent de rester dans nos mémoires, c'est aussi à eux que je rends hommage ici
j aimerai rajouter une expérience personnelle concernant l'histoire de Lyon et de notre père :
RépondreSupprimerAlain CURIAL
(1947)
Fils de Georges (1914 - 1980)
Ex-agent des Groupes Francs Vème bureau de l’Armée Secrète
Rescapé de Montluc / Neuengamme / Lübeck
Le 5 février 1983 a été, pour moi, un jour particulier inoubliable.
Pendant les années 1965 – 1970, j’avais souvent rejoint mes parents a la
Fédération Nationale des Déportés, Internés, Résistants et Patriotes (FNDIRP) de
Lyon, période au cours de laquelle des anciens déportés et résistants s’étaient
notamment mobilises pour faire revenir le gouvernement français sur les lois de
prescription des crimes de guerres et, bien évidemment, ici, à Lyon pour faire
extrader et juger « le boucher de Lyon », Klaus Barbie. Je me souviens encore
parfaitement d’une réunion à la mairie du 6ème arrondissement au cours de
laquelle Beate et serge Karsfeld avaient expliqué comment ils avaient retrouvé la
trace de Klaus Barbie, alias Klaus Altmann, en Bolivie.
Ce 5 février 1983, toutes les radios et télévisions avaient annoncé l’arrestation
en Bolivie et l’extradition en France de Klaus Barbie.
J’avais alors eu une pensée émue pour tous nos amis, internés, résistants,
déportés, qui avaient tant espérés voir un jour ce monstre jugé et condamné.
Bien sûr, j’avais suivi tout le long de la journée cet évènement avec attention et
satisfaction, tout en me posant la même question que tout le monde : sera-t-il
incarcéré et jugé à Paris ou à Lyon ?
Cette soirée du 5 février, en ramenant en voiture une amie à son domicile,
j’avais appris par des reportages radio que l’avion de Barbie devait atterrir à
Lyon ; il avait été aussi signalé que des personnes souhaitaient assouvir leur
vengeance sur lui.En arrivant aux abords de la prison de Montluc, j’ai aperçu des journalistes qui
attendaient devant l’entrée. Je me suis alors approché, tout en imaginant le
retour de Barbie dans cette sinistre prison, où il avait fait enfermer et souffrir
tant d’innocents.
Au terme d’une attente relativement longue, un convoi cellulaire de
gendarmerie s’est présenté devant le lourd portail métallique de la prison, où il
est resté stationné pendant quelques minutes. Ce fourgon de gendarmerie, dont
toutes les vitres étaient occultées par des couvertures, était bien celui
transportant l’homme attendu.
Quant une des couvertures a été légèrement entrouverte, j’ai parfaitement
reconnu le visage arrogant de Klaus Barbie, notamment l’impression de ses
yeux ronds. Je l’ai imaginé à l’arrière de sa traction, dans son uniforme de chef
de la Gestapo, allant commettre ses exactions honteuses.
A cet instant-là, les visages des personnes disparues que j’avais côtoyées, qui
avaient évoqué avec tant de souffrances toutes les sombres années de
l’occupation, ont défilé devant mes yeux
Lorsque le convoi est entré dans la cour de la prison, un instant que jamais je ne
pourrai oublier, un frisson de satisfaction m’a envahi. Le procès de Klaus Barbie
pouvait commencer. Il serait enfin confronté à ses victimes et à l’Histoire.
Ce jour là…, toutes mes pensées ont été pour mon père, je me suis
dit : « Papa, toutes ces années passées à te battre pour qu’ait lieu un nouveau
procès, que Barbie soit condamné au regard des tortures et
souffrances infligées…Cette soirée est pour toi. »…
Merci pour ce témoignage vécu
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